Portraits croisés

Je vais commencer cet article par une citation d'un autre voyageur en guise d'introduction : " On croit qu'on va faire un voyage mais bientôt c'est le voyage qui vous fait ou vous défait", Nicolas Bouvier.

Un voyage est bien sûr géographique, physique mais aussi souvent intérieur.

Les différentes cultures et modes de vie que nous rencontrons améliorent notre décodage du monde dans lequel nous vivons. Et les situations inconnues dans lesquelles nous nous retrouvons améliorent notre connaissance de soi.

D'autre part, le voyage nous fait différent, nous rend plus disponible, plus détaché du temps. Nous oublions vite nos habitudes liées à notre mode de vie occidental. Quelle heure est-il ? Il faut pas que je tarde, on en reparle ? Encore en retard ce RER ! Des embouteillages !? C'est pas le moment, je suis pressé !... En somme, une course perpétuelle contre le temps qui nous empêche de prendre du recul sur nos vies, sur nos envies et nos projets, sur notre bien être intérieur.

Nos expériences, nos apprentissages, nos rencontres nous construisent et nous déforment au quotidien. Ce que nous pensons aujourd'hui, le penserons nous toujours demain ? Le voyage est une des expériences de vie des plus enrichissantes, des plus déformantes de part la richesse et la diversité des situations inconnues qu'il offre.

Même s'il est vrai qu'il reste une part de hasard, le chemin que l'on choisit de prendre dans nos vies est d'abord le fruit de notre éducation, de nos convictions, de nos rencontres et de notre capacité et notre investissement à se créer des opportunités. La vie est faite de choix. En regardant en arrière, la vie peut être vue comme une arborescence avec des voies que nous avons empruntées et des ramifications restées inexplorées. 

Pour choisir sciemment notre voie dans ce monde, il faut connaître l'ensemble des possibilités qui nous sont offertes. Ce but est naturellement inatteignable mais les rencontres et les expériences que l'on peut faire, agrémentent l'éventail des possibilités que nous discernons.

Je profite de ce magnifique espace public qu'est la toile, pour vous faire part de 3 rencontres qui m'ont notablement marqué durant ce début de voyage. Ces individus ont le point commun d'avoir fait des choix différents qui rendent leur vie atypique. Ils ont tous trois également en commun, une volonté forte de contrôler leur quotidien. 

Mon premier est un "baba", un hippy qui a choisi de profiter des douceurs de la vie sans aucune attache. Cet européen d'une trentaine d'années passe 10 mois de l'année à jouir d'une vie simple en Inde, les deux autres mois étant consacrés à l'obtention d'un visa, à la famille et à gagner suffisamment d'argent pour l'année suivante. Sa philosophie, s'il l'on veut se créer des problèmes, du stress on en a le droit ; moi j'ai choisi une vie différente, une vie simple. Fils d'un haut fonctionnaire de l'armée et d'une professeur d'Université, cet individu a choisi, à 20 ans, de prendre une tangente, en rejet d'une éducation stricte, conventionnelle, dans le culte de la réussite professionnelle et sociale. Cela fait maintenant 10 ans qu'il  VIT heureux pendant 85 % de son temps en Inde.

Mon second est un jeune retraité d'une cinquantaine d'années, un businessman qui a investi au bon moment dans l'immobilier à Sydney. Selon ses dires, il n'a jamais travaillé, cependant contrairement à mon premier, ce qui le caractérise est un goût prononcé pour entreprendre, pour la prise de risques.

Aujourd'hui, il pratique sa passion : la peinture et investit son temps et son argent dans différents projets en Asie et en Océanie. J'ai pu participer avec lui à un petit chantier de construction qu'il dirigeait, finançait et avait même conçu. Cet entrepreneur a décidé pour s'occuper, pour avoir un pied à terre dans le sud de l'Inde et pour aider un ami indien, de lui construire une petite Guesthouse (une construction métallique de 6 pièces principales de plain pied) à Alleppey.

Mon dernier est un nouveau voyageur d'une trentaine d'années, un ancien cadre parisien qui ne vivait qu'à travers l'argent et la réussite professionnelle. Il a décidé avant le burn out, de changer radicalement son mode de vie. En trois ans, il est passé d'un individu ambitieux qui a connu des réussites professionnelles dans différents secteurs à un sans domicile fixe qui s’apprête à traverser l'Inde à pied avec un sac à dos. Plus de 5000 km en solitaire en débutant par le Ladakh, c'est une aventure extraordinaire qui n'a encore jamais été réalisée. Avant de partir, il a revendu tous ses biens acquis lors de sa précédente vie qu'il juge durement. Il envisage aujourd'hui une vie nomade en essayant de vivre des potentielles retombées de telles expériences extraordinaires (livres, livres photos, conférences...). Pour suivre son aventure, voici son blog.

Ces trois personnages attachants ont tout trois, pris des chemins différents avec comme point commun un autre quotidien que la majorité d'entre nous. 
Je n'ai volontairement cité que les choix de vie les plus "extrêmes" pour illustrer la diversité des possibilités offertes !